"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

mercredi 22 novembre 2017

Prêtre George Maximov L'HOMME D'ANTIGUA* QUI FONDA "L'ÉGLISE ORTHODOXE AFRICAINE"


George Alexander MacGuire


Antigua et Barbuda est une nation insulaire dans la mer des Caraïbes. Parmi ses fils, George MacGuire, le fondateur de «l'Église orthodoxe africaine» occupe une place importante. Au moment de sa mort, l'Église comptait environ 30.000 fidèles, 50 membres du clergé et des dizaines de paroisses aux États-Unis, en Ouganda, au Kenya, au Canada, au Venezuela, à Cuba et à Antigua. Qui était cet homme, et pourquoi a-t-il dirigé sa recherche spirituelle vers l'Orthodoxie?

George MacGuire naquit le 28 mars 1866 sur l'île d'Antigua dans le village de Svits. Il y passa son enfance et sa jeunesse. Il termina l'école et le collège locaux, puis le séminaire de l'église morave. Il fut pasteur de cette église pendant six ans, de 1888 à 1894.

En 1894, George déménagea aux États-Unis, où il se convertit à l'anglicanisme, puis deux ans plus tard, il devint prêtre anglican. Il fut le recteur de l'église de Saint Philippe à Richmond (1898-1900), à l'église de Saint Thomas à Philadelphie (1901-1905), et missionnaire auprès des Afro-Américains en Arkansas (1905-1909). Est témoin de son talent de prédicateur, le fait qu'après seulement quatre ans à ce poste, il augmenta le nombre de missions de un à neuf.

En 1910, il reçut une éducation médicale au Boston College. À cette époque, il fonda à Cambridge une communauté pour les immigrants noirs des Caraïbes. Cependant, l'église épiscopalienne ne reconnaissait pas cette communauté et MacGuire était de plus en plus convaincu que dans une église où son propre évêque soutenait le principe de la ségrégation, il y avait peu de perspectives pour les Noirs.

Après avoir reçu des nouvelles de la maladie de sa mère, George quitta tout et retourna à Antigua en 1913. Là, il prit soin de sa mère pendant cinq ans, servit dans l'église anglicane et donna des soins médicaux aux nécessiteux.
Après la mort de sa mère, MacGuire retourna aux États-Unis et y prit une part active dans le mouvement favorisant la citoyenneté et l'égalité des droits sociaux de la population noire. Étant un chrétien croyant, il voulut fournir cette égalité dans la vie de l'église. Il avait l’habitude de dire à ses disciples: «Nous sommes obligés de retourner dans notre église natale». Et à la recherche de cette Église, George découvrit la tradition chrétienne orthodoxe. Cela l'inspira tellement qu'en 1921, à la surprise de beaucoup, il annonça la création de «l'Église orthodoxe africaine» dont il devint le chef.

Pourquoi George MacGuire a-t-il jugé nécessaire de tourner le regard des chrétiens noirs américains vers l'Église orthodoxe? Il nomma deux raisons. D'abord, parce que c'est l'Église originale et authentique du Christ, qui a une succession apostolique ininterrompue. Deuxièmement, parce que l'Orthodoxie «n'a jamais été associée au racisme et au colonialisme.»

Vraiment, les chrétiens noirs ont fait partie de cette Église depuis l'Antiquité et sont même devenus des saints orthodoxes célèbres. Par exemple, saint Moïse le Noir (ou l’Ethiopien), moine du quatrième siècle qui vécut dans le désert égyptien, et bénit Elezvoi, roi d'Éthiopie.

On considère que MacGuire fut aidé dans son introduction à l'Orthodoxie par le Jamaïcain Robert Morgan, qui était avec lui prêtre de l'église épiscopalienne aux États-Unis et son successeur en tant que recteur de l'église de Saint Philippe à Richmond. Même au début du XXe siècle, Morgan avait commencé à étudier l'histoire de l'Église et, par conséquent, il était convaincu que l'Église orthodoxe était le «pilier et le fondement de la vérité». En 1904, il se rendit dans l'Empire russe afin de se familiariser avec l'Orthodoxie non seulement d’après les livres, mais dans la vie. Là, il visita les monastères et les églises de Moscou, Saint-Pétersbourg, Kiev et Odessa, et fut même invité d'honneur de l'empereur russe Nicolas II. Bientôt Robert Morgan reçut l'orthodoxie sous le nom de Raphaël et, en 1907, il fut ordonné par le métropolitain... comme prêtre de l'Église orthodoxe de Constantinople.

Un tel contraste frappant, le fait qu’un jeune chrétien noir est reçu avec un grand amour au plus haut niveau dans un pays orthodoxe alors que dans son propre pays, il n'a même pas le droit de boire de l'eau de la même fontaine qu'un blanc, convainquit MacGuire mieux que toute déclaration selon laquelle l'Église orthodoxe est exemptede  racisme, et pas seulement historiquement mais aussi dans les temps modernes.

Mais contrairement à Raphael Morgan, George MacGuire prit un chemin différent; il ne rejoignit pas personnellement l'Eglise orthodoxe, mais il décida de fonder sa propre grande église, supposant que dans le futur il arriverait à un accord avec l'Orthodoxie pour la faire reconnaître. L'initiative de MacGuire trouva rapidement des sympathisants, tout d'abord parmi les gens d'Antigua et d'autres îles des Caraïbes vivant aux États-Unis qui affluèrent vers son église. Grâce à ses talents de prédicateur et d'organisation, le nombre de fidèles augmenta rapidement et des branches de l'église commencèrent à apparaître en dehors des États-Unis, y compris en Afrique.

Dès le début, George MacGuire entama des discussions avec l'Église orthodoxe russe au sujet de son ordination, mais bien qu'il ait été accepté avec bonté, il ne put recevoir ce qu'il demandait. La raison en était qu'il voulait essentiellement recevoir l'ordination d'une Église dont il n'avait pas l'intention d'être un pasteur, mais plutôt de diriger sa propre «église indépendante», ce qui contredit les règles et les enseignements orthodoxes sur l'Église. Néanmoins, il parvint à un accord avec l'archevêque Vilett, chef de l'église catholique américaine autoproclamée. Vilett ordonna George MacGuire évêque le 28 septembre 1921.

La même année, MacGuire rencontra personnellement le Patriarche de Constantinople Meletios et a discuté avec lui de la possibilité de reconnaître «l'Église orthodoxe africaine». Il convainquit le Patriarche qu'ils croyaient en la Trinité et aux deux natures du Christ incarné aux sept Conciles œcuméniques, prêchaient le Credo sans changement (sans l'addition catholique du filioque), vénéraient la Mère de Dieu, et croyaienent au salut non seulement par la foi mais aussi par les œuvres. Selon les paroles de George, le Patriarche convint que leur enseignement sur ces points était orthodoxe, mais la question de les accepter dans la communion canonique fut reportée jusqu'à ce que "l'église orthodoxe africaine" "démontre stabilité et croissance".

En 1924, le Patriarche de Constantinople suivant Grégoire VII, dans le cadre du dialogue continu, demanda plus d'informations sur l'église de MacGuire. En fait, bien qu'elle ait accepté à bien des égards l'enseignement dogmatique orthodoxe, dans tous les autres domaines, y compris les services divins et la vie paroissiale, l '«église orthodoxe africaine» continuait à défendre l'ordre anglican. Au cours de la vie de George MacGuire, son plein recours aux voies orthodoxes n'eut pas lieu et, par conséquent, il ne devint pas une partie de l'Église orthodoxe universelle.

George mourut le 10 novembre 1934 et fut enterré dans le Bronx. Après sa mort, la branche de «l'église orthodoxe africaine» en Ouganda et au Kenya, dont les paroissiens comprenaient plus d'un tiers des fidèles, entra dans l'unité avec l'Église orthodoxe canonique et devint une partie de l'ancien patriarcat d'Alexandrie. Ainsi ont-ils amené à sa conclusion logique le mouvement que MacGuire avait initié. Grâce à ses efforts, en fin de compte des milliers d'Africains trouvèrent leur chemin vers l'Orthodoxie.

À l'heure actuelle, dans l'île natale de George, à Antigua, une paroisse de l'Église orthodoxe canonique de la juridiction antiochienne a ouvert ses portes. Cela pourrait être considéré comme un bel achèvement symbolique du chemin que ce fils distingué d'Antigua commença il y a 100 ans.

Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après

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* Antigua

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