"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

vendredi 14 octobre 2016

FEUILLETS LITURGIQUES DE LA CATHÉDRALE DE L’EXALTATION DE LA SAINTE CROIX



1/14 octobre
FÊte de la Protection de la Très Sainte Mère de Dieu

St apôtre Ananie, des septante, St Romain le Mélode († 556), St Sabbas de Vichera († 1461),
St Rémi de Reims  († 533)

Lectures : Hébr. IX, 1-7 ; Lc. X, 38-42 ; XI, 27-28

LA FÊTE DE LA PROTECTION
DE LA TRÈS SAINTE MÈRE DE DIEU

S
ous le règne de l’empereur byzantin Léon le Grand (886-912) vivait à Constantinople un fol en Christ, dont le nom était André. A ce sujet, il convient de mentionner que « la folie en Christ » constitue une catégorie particulière, très élevée, de l’ascèse chrétienne. Se donnant volontairement l’aspect d’hommes insensés, les « fols en Christ » étaient constamment exposés aux offenses et délaissés par tous. La nourriture, le vêtement, le toit, semble-t-il ne constituaient pas pour eux une nécessité absolue. Malgré cela, ils avaient constamment les yeux de l’esprit et du cœur élevés vers Dieu, qui leur donnait des dons tels que celui de clairvoyance.
En souvenir de la vision suivante de St André le fol en Christ, fut établie la fête du Voile (ou de la Protection) de la Mère de Dieu : lors de la vigile célébrée en l’église des Blachernes à Constantinople, où était gardée la robe avec le mamphorion et une partie de la ceinture de la Mère de Dieu, vint le bienheureux André. Là se trouvait aussi Épiphane, disciple de St André, et l’un de ses serviteurs. Selon son habitude, André se tenait debout, parfois jusqu’à minuit, parfois jusqu’au matin, en fonction de ses forces. A la quatrième heure de la nuit, le bienheureux vit une Femme majestueuse s’avancer depuis les portes de l’église en compagnie de St Jean Baptiste, St Jean le Théologien et de nombreux autres saints en vêtements blancs. Lorsqu’Elle s’approcha de l’ambon, St André dit à St Epiphane : « Vois-tu la Dame et Reine du monde ? » « Je la vois, père spirituel », répondit-il. Et lorsqu’ils regardèrent, ils virent qu’Elle priait longuement pour le peuple présent. A la fin de la prière, elle ôta le voile qu’elle portait sur la tête, brillant comme un éclair, et l’étendit au-dessus de la foule. Le voile était si grand qu’il recouvrit toute la nombreuse assemblée, mais restait suspendu en l’air, soutenu par une force mystérieuse. La Mère de Dieu s’éleva alors dans le ciel et disparut, laissant au peuple chrétien son saint voile en garantie de sa protection bienveillante. Dans l’office de ce jour la sainte Eglise loue la Très Sainte Mère de Dieu comme « la magnifique Protection du monde entier », et elle La prie de nous protéger par son « omophore de miséricorde ». L’église des Blachernes a été détruite par un incendie en 1434, et il n’en est resté que la source miraculeuse de la Mère de Dieu. Sur cet endroit même a été construit une nouvelle église en 1867, qui existe jusqu’à nos jours. La source miraculeuse, dont l’eau opère de nombreuses guérisons, se trouve dans l’église même.

St Romain le Mélode était originaire de Syrie et était sacristain de l’église Sainte-Sophie de Constantinople. Peu lettré, il ne participait pas au chant liturgique lors de l’office. Une fois, lors de l’octave de la Nativité du Christ, alors que l’empereur était présent, les clercs l’obligèrent à monter sur l’ambon et à chanter. Cela peina profondément saint Romain, et il pleura longuement à l’issue de l’office, priant ardemment devant l’icône de la Mère de Dieu. La nuit même, Celle-ci lui apparut en vison et lui donna un parchemin, qu’elle lui ordonna de manger, ce qu’il fit. A son réveil, le saint ressentit en son cœur une joie spirituelle, et une illumination inhabituelle de son esprit. Venant à l’église, il monta sur l’ambon et chanta d’une voix douce le chant qu’il avait composé : « En ce jour la Vierge enfante Celui qui est transcendant », chant qui devint par la suite le kondakion de la Nativité du Christ. Tous furent en admiration devant la sagesse du sacristain illettré. St Romain devint diacre et s’endormit dans le Seigneur à la fin du Vème siècle, nous ayant laissé de nombreux offices. Des canons de St Romain ont été traduits en français et édités dans la Collection « Sources et autres parties de l’office liturgique composé par lui. Les hymnes Chrétiennes » (Éd. du Cerf). St Jean de Changhaï († 1966) avait promulgué un décret selon lequel le jour de St Romain le mélode était fixée la fête des chantres du diocèse d’Europe Occidentale. A la fin de la Liturgie, on devait leur chanter « ad multos annos ».




Tropaire de la fête de la Protection de la Mère de Dieu, ton 4
Днéсь благовѣ́рнiи лю́дiе свѣ́тло пра́зднуемъ, осѣня́еми Твои́мъ, Богома́ти, пришéствiемъ, и къ Твоему́ взира́юще пречи́стому о́бразу, уми́льно глаго́лемъ: покры́й на́съ честны́мъ Твои́мъ Покро́вомъ и изба́ви на́съ отъ вся́каго зла́, моля́щи Сы́на Твоего́, Христа́ Бо́га на́шего, спасти́ ду́ши на́ша.
En ce jour, célébrons cette fête avec joie ô peuples fidèles, à l’ombre de Ta venue, Mère de Dieu, et élevant le regard vers Ta très pure icône, disons avec attendrissement : protège-nous par Ton vénérable voile, et délivre-nous de tout mal, priant Ton Fils le Christ notre Dieu de sauver nos âmes.

Kondakion de la fête de la Protection de la Mère de Dieu, ton 3
Дѣ́ва днéсь предстои́тъ въ цéркви и съ ли́ки святы́хъ неви́димо за ны́ мо́лится Бо́гу, Áнгели со архиерéи покланя́ются, апо́столи же со проро́ки ликовству́ютъ: на́съ бо ра́ди мо́литъ Богоро́дица Превѣ́чнаго Бо́га.
La Vierge en ce jour est présente à l’église, et prie invisiblement Dieu pour nous avec le chœur des saints ; les anges se prosternent avec les pontifes, les apôtres avec les prophètes constituent des chœurs ; la Mère de Dieu prie pour nous le Dieu Prééternel.
VIE DE SAINT RÉMI DE REIMS[1]
La naissance de saint Rémi fut prédite à ses parents, alors avancés en âge, par un saint ermite du nom de Montan (438). Pendant sa jeunesse, le noble garçon cultiva avec succès les sciences sacrées et profanes, puis il se retira pour mener la vie solitaire dans une petite maison près de Laon. Sa conduite était si édifiante que, le siège épiscopal de Reims étant vacant, le clergé et le peuple de cette ville vinrent le soustraire à sa retraite pour le nommer évêque, malgré ses vingt-deux ans. Lors de sa consécration, saint Rémi émanait un céleste parfum et son front était tout lumineux.
Le jeune prélat devint bientôt la personnalité la plus célèbre de Belgique et du nord de la Gaule. Par son ardente prédication, il convertissait les païens et amenait les hérétiques ariens au repentir. Il créa des diocèses, établit des pasteurs et inspira aux habitants de ces régions, dévastées par les récentes invasions barbares, l’amour des ennemis, le désintéressement et le désir des biens célestes. Partout où il prêchait, de nombreux miracles venaient confirmer la vérité de son enseignement et, par sa prière, il guérissait les malades et délivrait les possédés. Pendant ses repas, les oiseaux venaient prendre leur nourriture dans ses mains. Un jour, un incendie s’étant déclaré dans la ville, il se jeta dans les flammes et les fit ainsi reculer. Pendant ces années où l’Occident romain souffrait l’agonie sous les invasions des peuples barbares, la Gaule était occupée, au sud par les Wisigoths et les Burgondes, partisans de l’arianisme, sur les rives du Rhin par les Alamans, et au nord par les Francs, restés païens. À la mort de son père Childéric, en 482, Clovis — qui n’avait que quinze ans — devint chef des rudes guerriers francs. Il était encore idolâtre, mais admirait les moines, et avait une profonde vénération pour les évêques orthodoxes, en particulier pour Rémi, dont il suivait les sages conseils. En 493, il épousa sainte Clotilde, qui exerça sur lui une influence bienfaisante. Alors que Clovis affrontait les Alamans lors de la bataille de Tolbiac (496), comme ses troupes reculaient, le souverain se tourna vers le Dieu de Clotilde et de Rémi. Sa prière fut exaucée, et il remporta une victoire éclatante. Clovis prit alors la résolution de se convertir au christianisme et demanda à saint Rémi de l’instruire dans les rudiments de la foi. En entendant l’évêque lui décrire les événements qui accompagnèrent la Passion du Christ, le généreux guerrier s’écria : « Ah ! Que n’étais-je là avec mes Francs pour le délivrer ! » Deux ans plus tard (25 décembre 498 ou 499), le chef barbare conviait à Reims, tous les personnages éminents du royaume et d’au-delà des frontières, pour assister à son baptême. La nuit précédant la cérémonie, saint Rémi réunit le roi et sa suite dans l’église pour leur faire un sublime discours sur la vanité des faux dieux et sur les grands mystères de la religion chrétienne. L’église se remplit alors d’une lumière et d’une odeur célestes, et l’on entendit une voix venue d’en haut proclamer : « La paix soit avec vous ! » Au moment de plonger le roi dans les eaux de la nouvelle naissance, Rémi lui dit : « Courbe la tête, fier Sicambre, adore ce que tu as brûlé et brûle ce que tu as adoré ». Mais, au moment de faire l’onction du nouveau baptisé avec le saint Chrême (myron), l’évêque s’aperçut que l’huile manquait. Il leva alors les yeux vers Dieu en une muette supplication, et une blanche colombe descendit du ciel, tenant dans son bec une ampoule pleine d’un liquide miraculeux. Deux sœurs du souverain et trois mille de ses seigneurs et soldats furent baptisés en même temps que Clovis, marquant la conversion définitive de ce peuple barbare. Sous la direction spirituelle de saint Rémi, Clovis — ce nouveau Constantin — continua par la suite l’unification des populations barbares et gallo-romaines en Gaule, et confirma son peuple dans la vraie foi. En 533, saint Rémi, parvenu à un âge avancé, devint aveugle. Persévérant dans la prière et l’espérance, il fut miraculeusement guéri, et put célébrer une dernière fois la Divine Liturgie avant de rejoindre l’assemblée des saints.




[1] Tiré du Synaxaire du Hiéromoine Macaire de Simonos-Petras.

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