"Dans la confusion de notre époque quand une centaine de voix contradictoires prétend parler au nom de l'Orthodoxie, il est essentiel de savoir à qui l'on peut faire confiance. Il ne suffit pas de prétendre parler au nom de l'Orthodoxie patristique, il faut être dans la pure tradition des saints Pères ... "
Père Seraphim (Rose) de bienheureuse mémoire

samedi 8 février 2014

Saint Grégoire de Tours: De la gloire des confesseurs




I. Des vertus des anges. Quand je demeurais dans le pays Arverne (Auvergne), un homme véridique me rapporta une chose que je sais d’ailleurs être vraie. On fait faire pour les moissonneurs une boisson qui se prépare avec des grains infusés et cuits dans l’eau ; c’est cette décoction qu’on appelle ceria [cervoise=bière]. Mais il y en avait trop peu; cet homme craignant le mécontentement de son maître et ne sachant comment donner à boire tout le jour à septante ouvriers qui moissonnaient sur le domaine avec un tonneau qui ne contenait pas plus de cinq muids [1 muid= 280 litres!], invoqua dévotement les noms des saints anges que les Écritures nous font connaître. Chose merveilleuse! on puisa au tonneau jusques à la nuit sans que le liquide manquât aux buveurs.

II. De saint Hilaire, évêque de Poitiers. Il y avait dans le pays de Gévaudan, sur une montagne nommée Helanus, un grand lac [Lac saint Andéol]. Là, à une certaine époque, une multitude de gens de la campagne faisait comme des libations en ce lieu; elle y jetait des linges on des pièces d’étoffe servant aux vêtements des hommes; quelques-uns des toisons de laine; le plus grand nombre y jetait des fromages, des gâteaux de cire et chacun, suivant sa richesse, divers objets qu’il serait trop long d’énumérer. Ils venaient avec des chariots, apportant de quoi boire, et manger, abattaient des animaux, et pendant trois jours se livraient à la bonne chère. Le quatrième jour, au moment de partir, ils étaient assaillis par une tempête accompagnée de tonnerre et d’éclairs immenses, et il descendait du ciel une pluie si forte et une grêle si violente qu’à peine chacun des assistants croyait-il pouvoir échapper. 
Les choses se passaient ainsi tous les ans, et la superstition tenait ferme ce peuple irréfléchi. Après une longue suite de temps, un prêtre qui avait été élevé à l’épiscopat vint de la ville même (Javols) à cet endroit et prêcha la foule afin qu’elle s’abstînt de ces pratiques de peur d’être dévorée par la colère céleste; mais sa prédication ne pénétrait nullement ces rustres épais. Alors, inspiré par la Divinité, le prêtre de Dieu construisit, loin la rive du lac, une église en l’honneur du bienheureux Hilaire de Poitiers, et y plaça des reliques du saint en disant au peuple : "Craignez, mes enfants, craignez de pécher devant le Seigneur; il n’y a rien à vénérer dans cet étang"… Ces hommes touchés au cœur se convertirent et abandonnèrent le lac; ce qu’ils avaient coutume d’y jeter, ils le portèrent à la basilique sainte, et furent ainsi délivrés des liens de l’erreur "

III. De saint Eusèbe, évêque de Verceil. A son tombeau guérissent les possédés. Ma mère plaça des reliques de ce saint dans l’oratoire de sa maison. Il arriva une fois, pendant l’hiver, que dans un joyeux entretien prolongé jusque fort avant dans la nuit, comme elle avait été longtemps assise devant le feu qui était formé d’un grand monceau de bois, elle se leva et ses gens étant déjà couchés, elle se mit sur un lit près du feu. Tout le monde dormait lorsque des étincelles montèrent du foyer jusqu’aux solives du plafond dont l’une se trouva prise et commença à projeter vivement la flamme. Mais cette flamme, par la puissance, je crois, du saint dont les reliques étaient près de là, ne faisait que courir le long des poutres sans les brûler jusqu’à ce que la mère de famille, s’étant éveillée et ayant appelé ses serviteurs, fit verser de l’eau et éteindre cet incendie.

IV. De Gatien, premier évêque de Tours (vers l’an 300). Saint Martin étant venu prier à son tombeau, ils se parlèrent!

V. A Artonne, bourg d'Auvergne, où se trouvait inhumée une sainte femme nommée Vitalina, saint Martin s’entretint de même avec elle. Comme il sortait de ce bourg, les sénateurs de la cité arverne, ceux qui brillaient en ce lieu par des ancêtres de noblesse romaine, apprenant que le saint homme approchait de la ville, sortirent à sa rencontre avec des chevaux, des voitures, des chars, des calèches ; mais lui, monté sur un âne, assis sur la selle la plus grossière, en atteignant au sommet du mont Belénus, d’où l’on voit bien le bourg de Riom se dessiner, les aperçut qui s’approchaient avec cette pompe…, et tirant la bride de son âne en arrière, il se mit à revenir par où il était venu. Il revint auprès de Vitalina. Poisson et vin trouvés miraculeusement un jour qu’on célébrait les vigiles en l’honneur de celle-ci et qu’on faisait un repas auquel Eulalius, archiprêtre du lieu, avait invité les clercs, tandis qu’Edatius, l’autre prêtre, préparait à manger pour la foule des veuves et des pauvres.

VI. Un certain prêtre nommé Léon est saisi de la fièvre et meurt au bout de trois jours pour avoir déplacé, dans l’intention de s’en servir pour son tombeau, une pierre sur laquelle le grand saint Martin s"était assis.

VII. Arbre au territoire de Neuilli (Nobiliacensi pago) pays de Tours, qui avait été déraciné et que saint Martin releva par un signe de croix. Il sert beaucoup aux malades qui prennent de son écorce dissoute dans l’eau. Nous avons nous-même vu cet arbre debout.

VIII. Oratoire du village de Martigni près Tours. Saint Martin y pria souvent. L’abbé Gunthaire, devenu évêque (de Tours, 552-555), forcé par son cheval de s’y arrêter pour prier aussi.

IX. Vertus médicales de l’huile prise à une lampe qui brûlait au tombeau de saint Martin ; d’après le témoignage d’Arédius, prêtre du pays de Limoges.

X. Vertus semblables, d’après le même témoignage, du raisin d’une vigne que le saint avait plantée, et de la cire des cierges mis sur son tombeau.

XI. Sur le territoire du château de Tonnerre qui appartient à la cité de Langres, saint Martin apparaît à un prêtre, boiteux, et le guérit.

XII. Un monastère de saint Martin en Espagne miraculeusement préservé du pillage lors de l’expédition du roi Leuvield contre son fils.

XIII. Un évêque arien ayant comploté avec un de ses adhérents de lui donner quarante sous d’or pour qu’il contrefit l’aveugle, et que lui, évêque, parût faire un miracle en lui rendant la vue, cet homme est frappé d’une véritable et douloureuse cécité.

XIV. Un catholique [id est orthodoxe] prouve contre un hérétique l’existence de la Trinité en tenant dans sa main, sans éprouver aucun mal, une bague d’or rougie, sur des charbons ardents.

XV. Venance enterré près de l’église de Saint-Martin. L’on obtient à son tombeau la guérison de la fièvre.

XVI. Sainte Pappola se fait religieuse dans un couvent d’hommes. On ne découvre qu'elle est femme qu’à sa mort, arrivée trente ans après.

XVII. Un pauvre homme ayant pris pour recouvrir le sépulcre de son fils le couvercle d’un tombeau qu’il avait trouvé dans la campagne caché parmi les ronces et les épines, mais qui se trouvait être celui d’un évêque nommé Bénigne [Apôtre de la Bourgogne], devient sourd, muet, aveugle et paralytique jusqu’à ce qu’il l’ait fait rapporter.

XVIII. Découverte miraculeuse du tombeau des deux vierges Maure et Britte.

XIX. Euphrone, évêque de Tours (556-573), annonce par une inspiration miraculeuse la mort du roi Charibert.

XX. Feu mystique aperçu au moment où Grégoire entrait dans une salle nouvellement consacrée au culte par ses ordres et sur l’autel de laquelle il venait déposer des reliques des saints Saturnin, Martin, Illidius et Julien.

in Livre Septième
traduction de H. Bordier
publié à Paris
1859-1862
(Nous avons quelquefois modernisé l'orthographe 
et précisé certains points du document. C.L.-G.)
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